Varaville au XVIIIe siècle

D’après les textes de l’abbé Chretien

Du XVI au XVIIIème siècle Varaville, comme figé par le temps, a peu changé. Les dunes sont toujours désertes et la seule route les reliants au bourg est peu praticable l’hiver. La chaussée romaine reste la seule voie permettant la traversée du marais.

La population est stable. Le recensement de 1720, dénombre 60 foyers soit environ 250 habitants et celui de 1840,  254 habitants. On y vit essentiellement de la terre. On dénombre ainsi 31 exploitations herbagères, 20 de labour et 6 de culture et d’élevage.

Sur la terre de Varaville, il est difficile de vivre correctement. Les 2/ 3 des habitants ne possèdent pas 100 livres de revenus. En 1720 seules 115 personnes payent un impôt au vingtième (5 % actuel). En 1790, 57 personnes payent la dime, 29 entre 5 et 10 livres, et 38 entre 10 et 100 livres. A titre comparatif le Baron de Varaville, Louis François Le Cordier paye 7518 livres

La mortalité est élevée. Un nouveau-né sur 10 décède avant 10 ans et 75 % de la population avant 60 ans. La mort la plus courante est la noyade accidentelle dans les fossés du marais. De 1700 à 1771, des gens de toutes conditions sont enterrés sous les dalles de l’église. Seul le chœur de l’église, la nef et la chapelle dédiée à la sainte vierge est pavée. On y dénombre 117 sépultures. A partir de 1771 faute de place ce mode de sépulture est interdit.

En 1716, Anne d’Ornano, la veuve du baron de Varaville, Louis Le Cordier et leur fils le Chevallier Louis Le cordier font don d’une cloche à l’église. Ils en seront le parrain et la marraine. En 1753, deux autres cloches les rejoignent.  Successeur de Jean Boutry, le curé Claude le Chanoine en paie une de ses deniers.

En 1788, les états généraux sont convoqués. Le collège du clergé est représenté par le curé Thomas Manchon (1757 à 1801) et le chapelain Louis Boutry. Bien que le petit hôpital fondé à côté du château au XIIème siècle et sa chapelle dédiée à St Jean l’évangéliste aient disparu, le chapelain dispose toujours des revenus des terres allouées à sa subsistance. Il emploie son temps comme précepteur des enfants et remplace si besoin le curé de la paroisse. Le collège des nobles de Varaville est modeste. On y retrouve Jean Le Roy d’Hautemare sieur du Hôme depuis 1736 et son fils Pierre Gabriel ainsi qu’Antoine Petit de Boisdaunay,baron de Varaville propriétaire du château. Contrairement à sa mère, il émigrera pendant la révolution. Le collège du tiers est constitué quant à lui des 115 assujettis à l’impôt des vingtième.

 

Malgré la misère et la pauvreté, les relations avec la noblesse sont bonnes. Les Le Cordier et les Morin de Valmerey sont fréquemment parrain ou marraine de roturiers ou de leurs domestiques.

La Révolution française réorganise la carte administrative. En 1790 Varaville fait désormais partie du Calvados et est rattaché au canton de Dives puis de Troarn. Sur proposition de Talleyrand, les biens de l’église sont nationalisés. L’église paroissiale n’est pas à vendre mais des parcelles appartenant à la cure et à la chapelle Saint Jean l’Évangéliste le sont. Ils seront essentiellement acquis par des Varavillais. En 1792 la convention s’acharne sur l’église. Le presbytère est mis en vente. Il est acquis par Thomas Binet. Cette petite maison de 3 pièces au rdc et à l’étage communiquait par une porte sur le cimetière. C’est actuellement une partie de la maison du 5 avenue de la libération. Entre émeutes, massacres et guillotine , de 1792 à 1793 il vaut mieux habiter Varaville qu’une grande ville.

La suppression de la dime, laisse l’église sans ressources. Le curé reçoit désormais un salaire de 1200 livres par an et doivent prêter serment à la constitution civile du clergé. Contrairement aux ¾ des curés du Calvados, Thomas Manchon prête serment « Je jure de veiller avec soin sur les paroissiens qui me sont confiés, d’être fidèle à la nation, à la loi et au roi et de maintenir de tout mon pouvoir la constitution décrétée par l’assemblée et acceptée par le roi » Il renouvellera par la suite tous ses serments.

 

Le coup d’état du 18 brumaire porte au pouvoir Napoléon. En 1801 il signe un concordat avec le pape. Le gouvernement prend en charge le traitement des évêques et des curés. Avec un curé pour mille habitants, Varaville perd son prêtre au bénéfice de Gonneville. Les paroissiens mécontent de devoir y aller écouter la messe demandent à l’Abbé François Grenier l’ancien chapelain de continuer à assurer le culte dans leur église, ce qu’il fera en toute illégalité jusqu’à ce que le maire Mr Huet lui retire les clefs de l’église. En 1803, à force de réclamations, l’évêque accepte que Varaville sans être toutefois reconnue comme paroisse ait à sa tête un prêtre. C’est ainsi que Gabriel Outardel succède à Thomas Manchon jusqu’à sa mort en 1811. En 1872, Varaville comptera une population de 261 personnes.